Le néon rose
Dans un bar éclairé d'un néon presque roseTenu par un garçon encore tout endormiQui sans la regarder lui servait un demiAssise elle attendait qu'arrive quelque choseUn regard sur sa montre, un regard au dehorsElle était là nerveuse à repeindre ses lèvresA se farder de trop, à transpirer de fièvreEt l'attente déjà faisait vibrer son corpsD'ordinaire, elle était probablement jolieMais la nuit, ce matin, le néon sur son fardAccusait trop ses traits, lui donnait l'air blafardQui chasse la fraîcheur et fait qu'elle s'oublieElle était à cet âge où l'on n'est pas pareilSelon l'humeur du temps, sympathique ou moroseElle était à cet âge où pour être une roseLa femme quelquefois a besoin de soleilLe jeune homme arriva tout à fait à son aiseDans une situation où d'autres seraient contrits-"Te voilà, déjà là, mais quel train as-tu pris?"Dit-il en souriant sur le ton des fadaises-"J'ai pris le même train que je prends tous lesjours"Lui répondit la femme avec des yeux de crainteEt vite elle s'approcha pour saisir une étreinteMais à ce geste-là le garçon resta sourdLe bar avait soudain ce relent de tristesseD'une maison en ruines où l'ortie a pousséD'une bague trop lourde aux doigts des fiancésD'un lit encore défait qu'un jeune amant délaisseL'amour s'en est allé bien qu'à peine cueilliDans ce bar éclairé d'un néon presque roseDans son cœur on venait de casser quelque choseElle avait tout à coup terriblement vieilliDans un bar éclairé d'un néon presque roseTenu par un garçon encore tout endormiQui sans la regarder lui servait un demiAssise elle attendait qu'arrive quelque chose