LA BARCELONE
La Barcelone
Quand elle s´éveille
C´est en jetant ses tulles noirs
Avec des éclats de soleil
Qui éclatent tous ses trottoirs
{x2:}
Au rire d´une rose de sang
Sur son éventail rouge et or
Claquent les talons des passants
Du fond du soir jusqu´à l´aurore
La Barcelone
Quand elle s´étire
Elle plante ses yeux dans la mer
Et puis quand les flots se déchirent
Elle descend jusqu´aux enfers
Pour venir rouler sous la table
D´une Espagnole aux seins tout ronds
Comme ces pommes de Grenade
Crachées aux lèvres d´un garçon
Et dans les rires qui s´étranglent
Amarrée au bout de son port
Elle tend sa gorge et ses jambes
Sous la muleta de l´amor
La Barcelone
Quand elle s´promène
Elle fourre au creux de ses reins
Le balancement d´une reine
Offerte aux rêves d´un vaurien
Alors du fond de ses entrailles
C´est une flamme qui se tord
Et dans le matin qui détale
La Barcelone vomit encore
Sur les chaussures des ivrognes
Qui s´éclaboussent en criant
Depuis les pieds jusqu´à la trogne
Aux vins d´une noce de sang
La Barcelone
Quand elle se glisse
Au plein cœur de l´après-midi
Sous l´arabesque qui s´hérisse
Par les griffes de Gaudi
Elle laisse flotter ses mantilles
Au feu du ciel qui les allume
Et c´est au profil de la ville
Une pluie de cendres et de plumes
Alors seulement elle s´endort
Dans l´arène du temps qui tombe
Sous la pique du picador
Que l´on incendie à la ronde
Et puis, les pieds du soir trépignent
Avec, pour prélude à la mort,
Une mendiante qui se signe
Et une mouette au fond du port
La Barcelone alors s´enroule
Dans un tourbillon de crécelles
Accrochées aux doigts de la foule
Jetées comme une poignée de sel
Et c´est une traînée de rouge
Qui remonte au bout de ses lèvres
Pour venir fleurir sur la bouche
D´un Christ brûlant comme la fièvre
Et c´est une guirlande d´or
Flanquée sur la gorge des filles
Qui tapent les mains sur leur corps
Pour une danse de Séville
Et puis le temps d´un seul éclair
La Barcelone se renverse
Comme on renverserait un verre
Trop plein d´une joie qui s´y blesse
Avant de venir s´échouer
Sur la poitrine d´un vieillard
Qui lui jette un lot de baisers
Rivés au fond de son mouchoir
Et puis, et puis elle file dans la nuit
Au bruit d´amarres qui se cassent
{x2:}
En écorchant cent mille rires
Jusqu´au tréfonds de sa carcasse
Ha! Ha! Ha! Ha!