Le Fil
C'est une douce habitude
Avant de dormir
Dans les nuits de solitude
De se souvenir
Si chacun de nous demeure
Dans son lit d'exil
Que de se parler une heure
Ne tient qu'à un fil
Un fil qui lie
Deux demi-sommeils qui s'ennuient
Près de l'autre et loin de son regard
On parle enfin de son cafard
Et du mal qu'on prend à naître
Dans ce monde-là
Et du jour qui va paraître
Et qu'on ne veut pas
Du frisson de ces nuits blanches
Qui vous fait le corps
Comme quand on fait la planche
Dans la mer du nord
Du vent qui souffle
Qui fait que les draps vous étouffent
Qu'il fait chaud soudain dans ce pays
Et qu'on les pousse au pied du lit
Qui nous fait enfin nous dire
Ce qu'on ne dit pas
Quand on fait l'amour et pire
Qu'on ne le fait pas
Qui nous fait enfin nous tordre
Loin de la pudeur
Solitaires, fous, et mordre
Plaisir et douleur
Alors défile
A travers les rues de la ville
Comme une onde qui fait dans le dos
Raz de marée dans un cours d'eau
Ma mie ma correspondante
A se tant parler
Ma nocturne, mon amante
On en oublierait
Qu'il n'est plus le moindre doute :
Par les temps qui courent
Y a des gens qui nous écoutent
Le fil n'est pas sourd
Il n'est pas de secret, même pour les amours